La Fédération Française de Tennis a vu trois de ses postes majeurs renouvelés durant cette dernière année, et les nominations plutôt surprenantes (Clément en capitaine de Coupe Davis, Mauresmo en capitaine de Fed Cup et Di Pasquale en futur DTN) font passer un message paradoxal aux acteurs du monde du tennis, en particulier celui de la prédominance des anciens joueurs de haut niveau.
Si la nomination d'Amélie Mauresmo sonnait comme une évidence tant sa carrière fut exemplaire et son envie de s'investir dans le développement du tennis féminin affirmé, celles de Arnaud Clément et d'Arnaud Di Pasquale peuvent paraître surprenantes, voire incompréhensible.
Petit tour d'horizon...
Il y a un an, Jean Gachassin président de la fédération voulait modifier les critères de recrutement du capitaine de Coupe Davis en faisant comprendre dans les médias que la fédération voulait reprendre le contrôle de la nomination des hauts postes au sein de la fédération...
Extrait d'une interview dans l'équipe en avril 2012 :
"On sait bien qu'il y a des relations amicales avec certains entraîneurs qui peuvent fausser le jeu [...] Je veux éviter à l'avenir que le capitaine soit empêché d'exercer à fond sa fonction parce qu'il est trop intimement lié à certains joueurs. Je ne veux pas entendre en cas de défaite que l'on a pris untel ou untel pour lui faire plaisir"
2 mois plus tard, Arnaud Clément, à peine retraité des terrains (voire même retraité pour prendre ce poste), était nommé capitaine de l'équipe de France alors qu'il est notoirement proche de certains joueurs de l'équipe en particulier Mickael Llodra avec qui il a remporté Wimbledon en 2007.
Cette proximité est à l'origine de question aujourd'hui suite à la défaite en 1/4 de finale contre l'Argentine : pouvait-il du fait de leur amitié ne pas sélectionner Llodra alors que les résultats du joueurs sont plus que médiocres depuis le début de la saison et sont particulièrement mauvais, que ce soit en simple ou en double sur terre battue ?
La question peut être légitimement posée tant d'autres solutions alternatives sont envisageables aujourd'hui, en particulier Richard Gasquet qui, même si blessé au pied et difficilement sélectionnable en simple, aurait pu faire une alternative plus que crédible en double associé à Julien Benneteau avec qui il a été médaillé de bronze durant les derniers JO.
D'ailleurs, l'absence de Gasquet n'est pas encore expliquée clairement puisque même dans le tennis Info, revue de la FFT, il n'est pas précisé s'il y a eu forfait du joueur ou non sélection par son capitaine.
Alors bien sûr il est toujours facile de critiquer des choix après coup, mais la question que l'on doit se poser est s'il n'y a pas eu interférence entre les sentiments et le bien de l'équipe...
Premier acte fort du deuxième mandat du Président de la FFT, proposer à la nomination au poste de DTN Arnaud Di Pasquale, actuel responsable du haut niveau masculin ayant bénéficié du programme organisé par Science Po pour les anciens joueurs de haut niveau .
La encore cette proposition, validée par la ministre des sports a vraiment surpris car mise à part sa carrière de joueur de haut niveau, Di Pasquale n'a aucune expérience dans le domaine de l'enseignement du tennis, de l'entraînement ou encore de la formation des enseignants.
Lorsque l'on voit la liste des autres personnes ayant postulé, et possédant une expérience bien plus grande au sein de la DTN, on peut également se poser la question du choix d'Arnaud Di Pasquale :
Thierry Tulasne : entraîneur fédéral depuis plus de 10 ans, ancien entraîneur de l'équipe de France de coupe Davis, ancien joueur de haut niveau et de coupe Davis et ayant coaché plusieurs joueurs sur le circuit.
Bernard Pestre : enseignant de tennis professionnel, responsable du secteur formation au sein de la DTN depuis plus de 10 ans, fondateur avec son frère de l'ACTJ
Thierry Pham : ancien joueur de haut niveau de de coup Davis, responsable administratif de la DTN
En faisant ce choix de propulser Di Pasquale DTN, la FFT a fait le choix de la communication au détriment peut être, et cela seul l'avenir nous le dira, des compétences et de la connaissance du tennis à tout les niveaux requises pour occuper ce poste.
De plus, le fait de confier le poste de DTN à une personne n'étant pas enseignant de tennis (ou du moins qui n'a pas d'expérience du terrain) est une première au sein de la fédération ou même au sein des autres fédérations françaises.
Conclusion :
L'objet de cet article n'est pas de remettre en cause les compétences ou même l'engagement et la sincérité de la démarche des deux hommes, il est plus sur le processus de décision au sein de la fédération.
Même si la volonté d'insuffler un peu de jeunesse au sein des cadres fédéraux est plutôt intéressante , le choix de mettre en poste deux anciens joueurs de haut niveau aussi peu expérimentés ne va t-il pas à plus ou moins long terme mettre Clément et Di Pasquale dans une situation difficile dans les nouvelles tâches qu'ils ont ou auront à gérer.
De plus, pour un président qui souhaitait mettre fin à la république des joueurs il y a un an à peine, le fait de nommer deux anciens joueurs de haut niveau à des postes clés de DTN et capitaine de coupe Davis envoie un signal fort sur la priorité laissé aux anciens joueurs professionnels plutôt que la valorisation du mérite sur le terrain et l'expérience.
Lorsque l'on additionne ces nominations avec celles surréalistes de certains entraineurs fédéraux au sein des pôles pour des joueurs ayant montré une attitude désastreuse durant leur carrière, plus des postes d'entraîneurs au sein des ligues « réservés » a d'anciens bons joueurs laisse présager, si ce n'est déjà le cas, une voie royale pour les anciens joueurs de haut niveau.
Bien sûr, l'expérience de ces personnes peut être un plus indéniable, mais la compétence pédagogique se limite t'elle seulement à son niveau de jeu passé ? On peut voir clairement que non et bon nombre d'exemples nous prouvent le contraire à commencer par Sam Sumick (entraineur de Victoria Azarenka), Ronand Lafaix (ancien entraîneur de Stéphane Robert et formateur de plusieurs jeunes joeurs prometteurs) ou encore Pascal Viegas, ancien CTR de Seine Saint Denis qui a entraîné entra autres Mathilde Johanson et Slimane Saoudi.
Ceci est une liste exhaustive qui ne prend pas en compte un bon nombre d'enseignants au sein des clubs qui réalisent un très gros travail de formation sans pour autant recevoir la considération méritée.
Le virage amorcé par la FFT dans sa politique de recrutement est un virage dangereux qui risque de couper la fédération des réalités du terrain et des clubs.
Ce qui est sûr aujourd'hui c'est que Arnaud Di Pasquale se pose aujourd'hui comme « l'homme du président » et semble influent dans bon nombre de décision. L'avenir nous dira si cette confiance quasi aveugle va être un bien pour le tennis français ou non mais une chose est sûre, pour l'instant, ce choix laisse perplexe